Supertramp : Breakfast In America

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En format vinyle pour mieux apprécier les détails de la pochette et respecter scrupuleusement la succession des titres, extirper délicatement la galette de sa pochette, éviter l'électricité statique et la dépose d'empreintes, déposer avec précision le diamant en évitant une grosse tension nerveuse qui rigidifierait les doigts et ferait trembler le poignet au risque de transformer l'experience en percuteur de chantier, chaque écoute de cet album est un processus mêlant angoisse, joie, voyage.

Avant Breakfast in America, Supertramp avait déjà connu un certain succès avec l'excellent album Crime of the Century sorti en 1974, mais ils restaient considérés comme un groupe de niche. Avec Breakfast in America, ils sont passés à un statut de superstars mondiales. 

Cet album Breakfast In America se doit d'être dans toute discothèque des passionnés de musique, compte tenu de l'innovation musicale et technique dont il a fait l'objet, sa musique avant-gardiste est toujours d'actualité. C'est un incontournable, un chef d'oeuvre Pop Rock, intemporel. Vendu à 22 millions d'exemplaires (dont 3 millions en France, 3ème album le plus vendu), il eut un mondial gigantesque.

L'album contient des tubes légendaires qui sont devenus des classiques du rock :

   - The Logical Song, l’un des plus grands succès du groupe, est une réflexion sur la perte d’innocence à l'âge adulte, et l’aliénation que peut provoquer l’éducation formelle; cette chanson est largement autobiographique pour Hodgson, qui a exprimé sa frustration face au fait que le système scolaire mettait trop l’accent sur la logique et pas assez sur la créativité.

   - Breakfast in America, satire de l'idéal américain, sur une mélodie légère et enjouée.

   - Goodbye Stranger qui exprime la liberté.

   - Take the Long Way Home, chanson introspective.

Chaque morceau de Breakfast in America est soigneusement construit et contribue à l'unité de l'album. Il n'y a pas de remplissage : chaque titre a une personnalité propre, et l’ensemble forme un voyage cohérent.

No Titre Chant Durée
1. Gone Hollywood Davies et Hodgson 5:20
2. The Logical Song Hodgson 4:11
3. Goodbye Stranger Davies 5:50
4. Breakfast in America Hodgson 2:38
5. Oh Darling Davies 3:49
6. Take the Long Way Home Hodgson 5:08
7. Lord is it Mine Hodgson 4:09
8. Just Another Nervous Wreck Davies 4:26
9. Casual Conversations Davies 2:58
10. Child of Vision Hodgson, Davies, Helliwell 7:25

1/ L'enregistrement : qualité et innovation

Enregistré en 1978 dans les studios Village Recorder de Los Angeles, ce studio était déjà réputé dans les années 70 pour sa qualité acoustique et son équipement haut de gamme. Supertramp a travaillé avec un équipement de pointe pour l’époque, sous la direction du producteur Peter Henderson et de l’ingénieur du son Russel Pope :

  • La console d'enregistrement utilisée était une console Neve, reconnue pour sa chaleur et sa précision. Cela a contribué à donner à l’album un son riche et clair.

  • L’album a été enregistré sur un magnétophone Studer A80 24 pistes, c'était l'un des premiers albums à utiliser 24 pistes là ou la plupart des enregistrements se faisaient encore sur 4 ou 8 pistes.

  • Des effets analogiques classiques comme les réverbérations à plaques EMT et des unités de delay à bande ont été utilisés pour ajouter de la profondeur aux pistes.

  • Le mixage s’est fait avec des haut-parleurs Altec Lansing et des systèmes spécifiques à l’acoustique du studio.

Supertramp a toujours été un groupe méticuleux dans le choix de ses instruments, et cet album ne fait pas exception. Voici les principaux instruments utilisés :

Les voix ont été superposées via plusieurs pistes pour obtenir un effet particulier, et l'usage du double tracking a été utilisé sur les voix et certains instruments pour donner plus de profondeur, sans compter qu'une attention particulière a été portée au placement des micros pour capturer les nuances du piano et du saxophone.

En somme, l’album doit sa qualité sonore à un mélange d’expertise technique, d’équipements de pointe et de l’utilisation créative d’instruments variés. Breakfast in America est un exemple parfait d’un enregistrement analogique des années 70 réalisé avec un soin méticuleux et un souci du détail.

2/ L'inspiration de l'album, fruit de la pochette

Bien que le titre et certaines chansons comme Breakfast in America ou Gone Hollywood semblent évoquer une thématique américaine, l’idée du titre Breakfast in America vient d’une chanson écrite par Roger Hodgson des années avant l’album, avec une touche humoristique sur les stéréotypes américains. Le groupe a trouvé que ce titre reflétait bien l’énergie et la satire légère de certaines chansons.

Cette satire est retranscrite sur la pochette, devenue iconique : elle représente New York vue depuis un hublot d’avion qui passe à hauteur de la statue de la liberté. Mais regardez bien, c'est un New York caricaturé en restaurant typique américain, les Diners : les gratte-ciels sont faits d’objets de cuisine (fourchettes, couteaux, cuillères, tasses, poivre, sel, boîtes de céréales, boîte d'oeufs, ketchup, assiette de pancakes,..) et la Statue de la Liberté en est la serveuse, jouée par l’actrice Kate Murtagh; elle tient un verre de jus d’orange à la place de la torche.

3/ Début des tensions au sein du groupe, qui amèneront leur séparation

Hodgson et Davies, les deux principaux compositeurs du groupe, avaient des visions très différentes de la musique : Hodgson préférait des chansons plus lumineuses et spirituelles tandis qu'au contraire, Davies aimait les thèmes sombres et introspectifs. Cette opposition a donné une richesse à l’album, mais elle a également semé des tensions; c'est pourquoi les deux ont travaillé séparément sur plusieurs chansons, enregistrant leurs parties chacun de son côté. Ce qui explique les tonalités variées de l'album.

Toutes les chansons avaient donc été écrites et arrangées avant leur entrée en studio d'enregistrement.

Le titre Child of Vision est d’ailleurs une confrontation musicale entre Hodgson et Davies sur leurs philosophies de vie opposées.

Ironiquement, le succès de l’album a continué à creuser un fossé entre Hodgson et Davies. Le duo s’est séparé quelques années plus tard, Hodgson quittant le groupe après l’album Famous Last Words (1982).